Protocoles expérimentaux
Suivi continu de la vie de grand plongeur
Nous entendons par grand sondeur ou plongeur le cachalot, la baleine de cuvier, le globicéphale noir et le dauphin de Risso. L’objectif de la mission est de détailler une journée de la vie d’un grand sondeur, pour chacune de ces 4 espèces. Nous observerons le cycle nycthéméral de plongée (un jour et une nuit), par le suivi en continu des émissions sonores et la réalisation du tracé de ses déplacements dans la colonne d’eau. L’estimation de la durée et de la profondeur de chasse, l'estimation indirecte des migrations verticales des calmars, la position par rapport au fond (bathymétrie) seront également observés.
3 trajectoires 3D calculées sur les enregistrement du 12 août 2018 au large du cap Sicié.
Combien de fois ces grands sondeurs chassent-ils par 24h ? Combien de temps restent-ils dans une zone donnée ? Quelle forme de nage adoptent-ils en fonction des bruits en différents octaves ?
Nous tenterons de démontrer la qualité du suivi des cétacés par une méthode non invasive en accord avec notre éthique et surtout avec les recommandations de la directive européenne sur l’expérimentation animale (Décret n° 2013-118 du 1er février 2013 relatif à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques.
Suivi de la pollution anthropophonique
Le Sphyrna a démontré en 2018, lors de sa première mission exploratoire en Méditerranée, sa capacité à constituer un observatoire acoustique de grande qualité. Sur la mission 2019, les deux drones (Sphyrna 55 et Sphyrna 70) seront positionnés par les scientifiques et réaliseront les enregistrements en dérive. Ils pourront suivre les bruits des navires en 2D en continu avec leur antenne.
Spectrogramme du passage du ferry Jean Nicoli de 200 m de long au large du cap Sicié durant 20 minutes
Ces mesures permettront, à terme, le calcul des rayonnements des bruits des navires, mettant en évidence l’hétérogénéité des zones rayonnantes, à travailler en priorité par l’armateur pour réduire la pollution acoustique, permettant ainsi une action plus efficace des compagnies pour lutter contre le fléau de la pollution acoustique en Méditerranée.
Couplage mesures sur KM3Net
Une originalité forte de notre projet est de coupler, en temps réel, les mesures acoustiques sous-marines par -2000m issues de KM3NeT, avec les mesures acoustiques surface des Sphyrnas.
KM3Net est l’acronyme de Cubic Kilometre Neutrino Telescope. C’est un projet européen d'observatoire de neutrinos installé en face de Toulon. Le professeur Glotin, avec son équipe, est responsable des mesures bioacoustiques de cet observatoire qui possède plusieurs hydrophones connectés en fibre optique aux serveurs de calcul deep learning de l’équipe Dyni LIS.Ces données sont traitées et indiquent la présence de grands plongeurs dans la zone (cf rapport DECAN Glotin et al. Pelagos 2016).
Elles seront directement transférées sur les Sphyrna pour optimiser le suivi acoustique de la faune dans cette zone très fréquentée par les cétacés. C’est donc une vue complète, depuis la surface et le fond, qui sera ainsi effectuée en continu, avec la validation croisées des estimations de chacun des systèmes.
situation de Meust dans la zone d’opération du Sphyrna
Ce couplage constitue en soi une Première et un gage de la fiabilité des estimations acoustiques conduites par les Sphyrnas dans d'autres zones de l'exploration.
Couplage mesures Satellitaires et in-situ
La synergie entre les données satellitaires et les capteurs embarqués des Sphyrna est riche avec des applications diverses. Par exemple, la détection de phytoplancton a été démontrée sur des images satellitaires (Blondeau-Patissier) et sont complémentaires aux mesures in-situ du détecteur embarqué sur les Sphyrna.
Le suivi de l’activité solaire et la météorologie de l’espace permettront également l’étude des corrélations entre facteurs physicochimiques de surface et l’activité solaire. Une telle étude pourrait s’appuyer sur des tables d’évènements ponctuels tels qu’éruptions et éjections de masse coronale. Un partenariat avec l’Observatoire Astronomique de Paris-Meudon, est porté depuis 2012 par Adeline Paiement (Toulon univ.) qui travaille à l’élaboration de telles tables (Almahasneh 2019; Jenkins 2019).
Photogrammétrie 3D d’herbier de Posidonie et du benthos
La Posidonie (Posidonia oceanica), fréquente sur le littoral français, est constituée d'un faisceau de cinq à huit feuilles rubanées, de 40 à 80 cm de haut et d'un centimètre de large. Elle forme et édifie des structures très particulières, appelées « mattes ». Ces structures sont constituées par l'enchevêtrement des rhizomes peu putrescibles et des racines, et peuvent se conserver pendant des millénaires et atteindre plusieurs mètres d'épaisseur (Pergent & Boudouresque et al., 2012)
Herbier de Posidonies
Les mattes mortes sont probablement la conséquence du mouillage répété de gros navires. Les mesures satellites ne sont pas parfaites pour ces estimations. L’intensification des activités de plaisance en zone cotière touristique pourrait être une cause de la mortalité des herbiers comme sur la façade nord de Porquerolles, en baie de Cavalaire, à Pampelonne, dans le golfe de Saint Tropez, en baies de Cannes et de Villefranche.
Un des objectifs est d’estimer par photogrammétrie 3D (caméra sous le drone avec asservissement porté par les deux flotteurs stables du Sphyrna) la densité des faisceaux de Posidonie, le nombre de feuilles par faisceaux et surtout le taux de couverture de l’herbier.
Prélèvements ADN
La mise en évidence de la présence de mammifères marins peut se faire par l’utilisation de l’ADN environnemental. L’utilisation de l’ADN présent dans l’environnement (eau, terre, sédiment, selles, …) permet d’évaluer la biodiversité d’un écosystème sans avoir besoin de prélever les organismes eux-mêmes. En effet, chaque organisme laisse une trace de son ADN dans l’environnement (peau, mucus, salive, selles, urine, cadavre, ...), preuve de son passage récent. Cet ADN, une fois prélevé et analysé, peut permettre d’identifier les organismes présents ou récemment passés dans un lieu.
Mesure de polluants
La mission est équipée de capteurs physico chimiques classiques permettant notamment la mesure en hydrocarbure et de la radioactivité dans l’écosystème. Le suivi de la nature du rayonnement radioactif est une spécialité de notre partenaire LemerPax qui permet de remonter une piste et un gradient pour un rayonnement donné. Ces données seront analysées par le LIS, le MIO et les partenaires qui rejoindront le projet.